Les maladies auto-immunes (MAI) résultent d’un dysfonctionnement du système immunitaire se manifestant par la rupture de tolérance du soi, c’est-à-dire que le système immunitaire s’attaque à nos propres cellules et tissus (Garvey, 2023).
L’origine, ou plutôt les origines, des maladies auto-immunes sont multifactorielles. L’environnement, la génétique, l’hygiène de vie (alimentation, stress, activité physique), les microbes, etc. jouent un rôle.
On estime aujourd’hui que 5 à 10 % de la population mondiale est touchée par une maladie auto-immune, dont une grande majorité (80%) survient chez les femmes. Les MAI surviennent aussi de plus en plus tôt au cours de la vie (inserm).
Quand le système immunitaire déraille
Le système immunitaire a pour rôle de nous protéger face aux agents pathogènes (virus, bactéries, mais aussi cellules cancéreuses).
Or, le système immunitaire peut parfois se dérégler et devenir trop sensible envers des éléments exogènes (extérieurs). Il va alors engendrer des « attaques » trop fortes face à des éléments pas si dangereux que ça. Cela peut se manifester par les allergies par exemple.
Le système immunitaire peut aussi s’attaquer aux propres cellules et tissus de l’organisme : c’est le déclenchement des maladies auto-immunes.
Les maladies auto-immunes forment un large ensemble constitué de maladies inflammatoires chroniques déclenchées par la perte de tolérance immunologique de l’organisme face à ses propres constituants (inserm).
Des éléments du système immunitaire (anticorps ou cellules) engendrent alors des lésions cellulaires ou tissulaires responsables de symptômes plus ou moins sévères.
Il existe des dizaines de maladies auto-immunes touchant divers organes et tissus. Les maladies auto-immunes peuvent être sous-classées en 2 groupes :
Les maladies auto-immunes systémiques qui affectent plusieurs systèmes ou organes. Les symptômes sont alors multiples et peuvent être différents d’un patient à l’autre. On peut citer le lupus érythémateux systémique.
Les maladies auto-immunes spécifiques d’organes qui se caractérisent par des dommages et une inflammation localisés à un organe : la thyroïde dans la maladie d’Hashimoto ou de Basedow, ou le pancréas dans le diabète de type 1, ou groupe d’organe comme dans le syndrome polyendocrinien auto-immun touchant les glandes endocrines (productrices d’hormones).
On compte à ce jour ~80 MAI. Toutefois, avec l’avancée des recherches, ces chiffres ne cessent de croitre.
L’immunité
L’immunité correspond à la capacité de notre organisme à se défendre contre des substances étrangères (microbes, fragments alimentaires, ect…). Nous classons l’immunité en 2 types : l’immunité innée et l’immunité adaptative.
L’immunité innée
L’immunité innée, ce sont les soldats de front (macrophages, cellules dendritiques, cellules natural killers…) qui sont présents dans tous les tissus.
Ces cellules immunitaires réagissent immédiatement, de façon non spécifique, lorsqu’elles sont en présence d’une menace.
Une fois activée, des cellules de l’immunité innée vont phagocyter (« manger ») l’agent pathogène, et vont ensuite se débarrasser du microorganisme ainsi que les « débris » causés par l’attaque.
L’immunité innée produit des médiateurs chimiques qui favorisent l’inflammation et alertent les éléments de la seconde ligne de défense, l’immunité adaptative.
L’immunité adaptative
L’immunité adaptative, assurée par les lymphocytes T et B se développe dans un second temps et si besoin, alertée par différents messagers de l’immunité innée.
L’immunité adaptative induit une réponse plus spécifique et plus puissante que l’immunité innée.
Les lymphocytes sont capables de reconnaître spécifiquement l’agent pathogène (en identifiant des parties clés de sa structure, appelées antigènes) grâce à des récepteurs présents à leur surface.
D’autres protéines de surface faisant partie du complexe majeur d’histo-compatibilité (CMH ou système HLA en anglais) leur permettent de distinguer ce qui appartient au « soi » (l’organisme) ou au « non-soi ».
Une fois activés, ces lymphocytes enclenchent une cascade complexe d’évènements biologiques. De façon simplifiée, les lymphocytes B conduisent à la production d’anticorps et les lymphocytes T à la destruction de l’agent pathogène.
Une partie des lymphocytes permet le développement d’une mémoire immunitaire durable.
Source (Corbier, 2019)
En résumé, l’immunité innée est générique et de courte durée, alors que l’immunité adaptative est spécifique et permet au corps de se souvenir à long terme des épisodes infectieux précédents, ce qui lui permet de réagir plus efficacement en cas de nouvelle infection.
L'autoréactivité
Parmi les lymphocytes, il existe des populations de lymphocytes T et B « autoréactifs », qui jouent un rôle important dans l’éducation de l’immunité.
Ces lymphocytes permettent d’apprendre à l’organisme à se débarrasser des débris de cellules ou des cellules anormales de l’organisme, avant que d’autres effecteurs ne les prennent pour des éléments étrangers.
Ce processus existe dès le développement embryonnaire et se poursuit tout au long de la vie.
Deux mécanismes dits de « tolérance immunologique », permettent de contrôler ces lymphocytes et d’éliminer ceux dont le degré d’autoréactivité est trop élevé car ils risquerait de réagir face à des éléments non étrangers :
un mécanisme central qui permet d’éliminer les lymphocytes T autoréactifs au niveau du thymus, et les lymphocytes B autoréactifs dans la moelle osseuse,
un mécanisme périphérique qui, parallèlement, permet le contrôle des lymphocytes autoréactifs qui auraient échappé au mécanisme central.
Lorsque ces processus de contrôle sont inefficaces ou imparfaits, les lymphocytes autoréactifs leur échappent et enclenchent une inflammation et des lésions tissulaires caractéristiques d’une maladie auto-immune.
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Comprendre le fonctionnement du système immunitaire est complexe.
A ce stade, vous vous demandez surement : mais comment et pourquoi le système immunitaire devient hypersensible et « tire sur tout ce qui bouge » ?!
Voici quelques pistes.
Les facteurs favorisant la rupture du soi
On ne cesse de le répéter : les maladies auto-immunes sont multifactorielles, ce qui rend difficile d’en déterminer l’origine exacte. Elles sont issues de l’association entre des facteurs génétiques, endogènes (internes), exogènes et/ou environnementaux :
Les facteurs génétiques
Quelques très rares MAI ont une origine monogénique, c’est-à-dire que la mutation d’un seul gène est responsable de la pathologie. Par exemple, la mutation du gène AIRE, peut engendrer un syndrome polyendocrinien auto-immun.
Toutefois, la très large majorité des MAI sont parfois favorisées par la présence de gènes de susceptibilité. Ces gènes ne causent pas la maladie, mais en augmentent le risque.
Parmi eux, figurent d’abord des formes particulières des gènes HLA. Certaines versions comme le HLA B27 (associé à la spondylarthrite ankylosante), HLA-DR4 (polyarthrite rhumatoïde), HLA-DR3/DR4 (diabète de type 1), HLA-DQ2 (maladie cœliaque)…, conduisent plus fréquemment à la présentation d’autoantigènes aux lymphocytes auto réactifs que les autres. Le risque d’échappement aux mécanismes de contrôle serait alors plus élevé.
Attention : être porteur de gènes de susceptibilité ne signifie pas que l’on développera systématiquement la maladie !
Les facteurs endogènes
Les hormones sexuelles, dont les œstrogènes jouent un rôle dans les mécanismes de contrôle de l’auto-immunité (Benagiano et al., 2019). Elles pourraient aussi avoir un rôle dans le sur risque des femmes à développer ces maladies.
L'inflammation chronique va aussi avoir une influence sur le risque de développer une maladie auto-immune.
Le rôle du microbiote intestinal est également pointé du doigt. De récentes études décrivent une association entre l’altération du microbiote intestinal (dysbiose), une hyperperméabilité intestinale et le développement/existence d’une maladie auto-immune.
Source : (Kinashi & Hase, 2021)
Des autoanticorps retrouvés chez les personnes atteintes de polyarthrite rhumatoïde ont été associés à l’existence de la parodontite (une inflammation chronique de la muqueuse gingivale initiée par la dysbiose du microbiote buccal) (Berthelot & Le Goff, 2010).
Néanmoins, il est encore difficile de savoir avec précision si la dysbiose est une cause ou une conséquence de la maladie.
Les facteurs exogènes et environnementaux
L’exposition à certains composants ou certains pathogènes semble associée au risque de maladies auto-immunes, sans qu’un lien de causalité soit parfaitement établi. Ainsi, la fréquence des infections préalables par les virus Epstein-Barr (Toussirot & Roudier, 2008) ou le cytomégalovirus est supérieure chez les personnes atteintes.
Le tabac et la pollution de l’air favorisent le développement de l’auto-immunité (Perricone et al., 2016).
Certains polluants environnementaux, les ultraviolets, le stress ou la nutrition sont aussi sur la liste des suspects dans le développement de maladies auto-immunes.
Bien qu’on ne comprenne pas précisément pourquoi une personne développement une MAI et pas une autre, mais la « recette » d’une MAI comprends :
Une susceptibilité génétique
Une hygiène de vie et une alimentation inadaptée
Un élément déclencheur : infection, stress, etc.
Alors que l’on pas vraiment agir sur notre génétique, ni même des infections, nos actions quotidiennes impactent notre hygiène de vie et donc notre épigénétique, et donc le développement ou non de MAI.
Plus de détails dans cet article.
Article écrit par Juliette, Diététicienne-nutritionniste France et Nouvelle Zélande.
Retrouvez plus de son contenu sur son site juliette-nutrition.com
Son Instagram: @juliettenutrition
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